Prise en charge des dispositifs médicaux numériques
L’article 58 porte sur l’innovation numérique, c’est-à-dire les dispositifs médicaux numériques notamment de télésurveillance, et les médicaments. Pour les dispositifs médicaux numériques, il crée un accès au remboursement anticipé et temporaire d’un an non renouvelable. Cependant, cette prise en charge est conditionnée à l’utilisation du dispositif médical numérique par le patient et au recueil de données en vie réelle. Et elle n’est pas cumulable avec celle au titre des prestations d’hospitalisation.
Concernant les médicaments, l’article vise à compléter la réforme du système d’accès précoce (art. 78 de la LFSS pour 2021) mise en œuvre depuis juillet 2021. Ainsi, le prix d’achat du médicament, qui a bénéficié d’une autorisation d’accès précoce, est plafonné pendant la période de continuité de traitement où la spécialité n’est plus prise en charge.
Les médicaments de thérapie innovante préparés ponctuellement pour une personne (MTI PP) et autorisés par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) font l’objet d’une prise en charge spécifique par l’Assurance maladie. Selon l’étude d’impact du PLFSS, au 30 juillet 2020, 8 établissements ou organismes étaient autorisés et 4 autorisations de MTI PP ont été délivrées par l’ANSM. Cependant, comme le souligne la même étude, « ces productions peuvent représenter un coût important pour les établissements de santé et à ce jour, aucune prise en charge spécifique par l’assurance maladie n’est prévue ». L’article 58 permet de « combler ce vide juridique » et de revoir la procédure de fixation de prix des médicaments lorsqu’ils peuvent être dispensés par les PUI autorisées. Un décret précisera les modalités de prise en charge.
Enfin, l’article 58 supprime le coefficient minorateur (art. L. 162‑22‑ 6 du Code de la sécurité sociale), qui devait entrer en vigueur en janvier 2022 afin d’établir un mécanisme prudentiel sur le remboursement des spécialités pharmaceutiques aux établissements exerçant des activités de soins de suite et de réadaptation.
Régulation pour les médicaments associés dans la liste en sus
L’article 59 porte sur les utilisations de médicaments hors-référentiel et leur prise en charge financière. Concrètement, il s’agit des spécialités en association à des médicaments de la liste en sus (LES) dont l’indication n’est pas inscrite dans le référentiel de prise en charge. Le prix de ces spécialités n’a donc pas été négocié dans ce cadre. « Certains médicaments, en particulier en oncologie, ont par conséquent un panel d’utilisations et de remboursements plus large que celui négocié avec le Comité économique des produits de santé, explique le Pr Samuel Limat, PU-PH et président de la Commission médicale d’établissement (CME) du CHU de Besançon. Cet article pose la question de la validité de la négociation économique sur le prix d’un médicament, puisque le prix initial a été fixé dans un périmètre A sur une indication et un volume, et que le médicament est utilisé dans un périmètre B avec une autre indication et un autre volume. La mesure vise par conséquent à renégocier le prix dans le périmètre B ». Ce problème de prise en charge concerne environ 20 % de médicaments et représente une dépense de l’ordre de 700 millions d’euros pour l’Assurance maladie.
L’article 59 propose de régulariser la prise en charge de ces médicaments et, en contrepartie, de mettre en place un système de remises obligatoires au regard du niveau d’utilisation hors référentiel de ces spécialités. Les modalités d’application seront précisées par décret. Si ces négociations concernent en premier lieu les industriels et l’Assurance maladie, et n’auront aucun impact sur les PUI, pour Samuel Limat cet article signifie que « les services de l’État et l’Assurance maladie commencent à regarder ce qu’il se passe de façon plus fine et qualitative sur ce qui est hors champs initial de remboursement de la liste en sus ». Cette nouvelle mesure de prise en charge et de remises a un rendement estimé à 100 millions d’euros par an, selon l’étude d’impact.
L’article 59 concerne également les dispositifs médicaux (DM) utilisés par les établissements de santé. Ceux qui seront inscrits sur une liste, dite « intra-GHS », devront faire l’objet au préalable d’une évaluation par la Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiMTS) de la Haute Autorité de santé (HAS). Ils pourront aussi être inscrits sur la LES par indication.
Production en urgence de préparations spéciales
L’article 61 vise la création d’un statut de préparations « spéciales » et l’autorisation des PUI à produire en urgence ces préparations essentielles que les laboratoires ne seraient plus en mesure de fournir. « C’est la déclinaison de la crise sanitaire, période au cours de laquelle il y a eu des tensions d’approvisionnement, voire des ruptures de médicaments en soins critiques, comme le curare, précise Samuel Limat. Il s’agit d’une réflexion pour que certaines PUI en fabriquent. » Un décret doit définir les conditions d’habilitation des établissements de santé pour réaliser ces préparations. « Cet article pose néanmoins la question de la capacité des PUI, en termes de ressources humaines et d’équipements, à prendre le relais des industriels », commente Samuel Limat. N’est-ce pas non plus le risque qu’à un moment donné, les PUI soient submergées par la demande ? Le décret d’application devrait apporter des réponses à ces questions.
Médicaments : un changement de paradigme
Dans un communiqué en date du 23 novembre, le Leem (Les entreprises du médicament) « salue un texte qui matérialise largement les mesures annoncées » lors du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) du 30 juin 2021. En effet, le PLFSS 2022 acte un taux d’évolution de l’Objectif national des dépenses de l’Assurance maladie (Ondam) de +2,4 %, ainsi que l’élargissement de la liste en sus à des médicaments de ASMR IV et, plus globalement, une augmentation des dépenses pour les produits de santé de l’ordre d’1 milliard d’euros. « Le leitmotiv du CSIS était de changer la vision du régulateur sur le poste des médicaments, observe Roland Cash, médecin et consultant en économie de la santé. Ce PLFSS marque un changement de logique, puisque le médicament n’est plus considéré comme une variable d’ajustement. Mais il faut voir à l’usage comment cela va se passer en cas de dépassements des dépenses, notamment pour la liste en sus dont la contrainte est desserrée par ce nouveau PLFSS. Un mécanisme de régulation est nécessaire. Il faut parvenir à renégocier les prix mais peut-être aussi rechercher une meilleure pertinence des prescriptions. »
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