Économie de la santé
21/10/2021

Gouvernance hospitalière : des changements stratégiques à l’échelle des CME

Dans un contexte de crise hospitalière, la gouvernance des établissements hospitaliers a été repensée pour accorder plus de place au médical au sein même de la structure ainsi que dans les Groupements hospitaliers de territoires (GHT). Des modifications qui sont en train de se déployer progressivement. Point d’étape.

Tensions sociales, problématiques d’attractivité, conditions de travail difficiles, manque de moyens et de financements : le malaise hospitalier, qui s’est traduit ces dernières années par différents mouvements de grèves et de contestations de la part du personnel, a trouvé sa réponse gouvernementale par la mise en place du Ségur de la santé de mai à juillet 2020.

La gouvernance au programme du Ségur

Dans le cadre de cette consultation des acteurs du système de soin, l’objectif a été de travailler à un regain d’attractivité des carrières, à un plan d’investissement, au management ainsi qu’à la gouvernance hospitalière. Sur ce dernier point, pas moins de trois textes traduisent des mesures concrètes : le rapport du Pr Olivier Claris de juin 2020, qui a mené une mission sur le sujet et devrait être prochainement traduit en instruction ; une ordonnance de mars 2021 relative aux GHT et à la médicalisation des décisions à l'hôpital et la loi Rist du 26 avril 2021 visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification. « La volonté affichée des tutelles est de remédicaliser la gouvernance pour rééquilibrer les prises de décision vis-à-vis des directions », constate le Pr Samuel Limat, pharmacien hospitalier, président de la Commission médicale d’établissement (CME) du CHU de Besançon.

Au sein de l’établissement hospitalier

À l’échelle des structures hospitalières cette médicalisation de la gouvernance se traduit par une forme de rééquilibrage entre la présidence de la CME et la direction. « Les textes prévoient qu’un certain nombre de concertations ou d’avis soient désormais des co-décisions CME/Direction générale », rapporte le Pr Limat. Des co-signatures ou des co-décisions sont exigées sur plusieurs points stratégiques.

Désormais, le président de la CME coordonne la politique médicale de l'établissement, conjointement avec le directeur de l'établissement et après concertation avec le directoire. Ils définissent également la politique d'amélioration continue de la qualité, de la sécurité et de la pertinence des soins, ainsi que des conditions d'accueil et de prise en charge des usagers. Ils arrêtent aussi l'organisation interne de l'établissement pour les activités cliniques et médico-techniques et procèdent à la nomination ou mettent fin aux fonctions des chefs de pôles d'activité clinique et médico-technique et des responsables des structures internes, services ou unités fonctionnelles de ces mêmes pôles. 

Autre élément fondamental : si jusqu’à présent la CME était consultée sur le projet médical d’établissement, désormais, elle est chargée de le préparer, de l’élaborer, de le proposer au directoire et de le piloter. 

Enfin, dans une logique de simplification, la loi d’avril 2021 offre la possibilité au directeur de l'établissement de décider, sur proposition conjointe des présidents de CME et de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques, après consultation du conseil de surveillance, de la création d'une commission médico-soignante se substituant à ces deux commissions. « Cette option devrait, dans les faits, être davantage saisie par les petits établissements que par les grandes structures », suppose le Pr Limat. Et de poursuivre : « Ce rééquilibrage entre la présidence de la CME et le directeur, avec un basculement vers plus de co-décisions, ainsi qu’un champ d’intervention plus large à l’échelle des investissements et des responsabilités est donc l’une des réponses trouvées par les pouvoirs publics à la crise hospitalière. »

Un impact pour les groupements hospitaliers de territoire

Les GHT sont également concernés par des changements au niveau de leur gouvernance. « Si jusqu’à présent ils avaient le choix entre une Commission médicale de groupement (CMG) et un collège médical, le choix se portant majoritairement sur la seconde option, aujourd’hui ils ont l’obligation de mettre en place une CMG au 1er janvier 2022 », indique le président de la CME du CHU de Besançon. 

Elle va notamment avoir pour rôle d’élaborer et conduire la stratégie médicale et le projet médical partagé du groupement et de réfléchir, en termes de prospective, sur les recrutements médicaux. Le texte prévoit que la CMG participe à la définition d'orientations stratégiques communes pour la gestion prospective des emplois et des compétences, l'attractivité et le recrutement, la rémunération et le temps de travail des personnels médicaux, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques, dans les limites des compétences des établissements à l'égard de ces personnels. « La volonté est de donner une dynamique et une stratégie harmonisée en termes d’attractivité territoriales et de rémunération entre l’ensemble des établissements du GHT afin notamment d’éviter toute forme de concurrence entre les établissements », indique le Pr Limat. 

Des interrogations demeurent néanmoins sur la représentativité des membres de la CMG. « Nous ne connaissons pas encore l’impact du poids de chaque établissement sur le nombre de voix au sein de la CMG pour la prise de décisions, fait savoir le Pr Limat. Cela reste à déterminer mais peut-être que les CMG vont, elles-mêmes, avoir à le définir. »

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Établi en août 2022