Pratiques innovantes
21/10/2021

Crise : les bonnes pratiques pour s’en sortir

Un dysfonctionnement dans un service de l’hôpital provoqué par un événement externe, de type incendie d’un bâtiment, ou interne telle une contamination d'isolateur dans une unité de préparation des cytotoxiques avec un impact direct ou indirect sur la PUI, requiert une réponse sensiblement semblable. Qu’importe la cause de ce genre de dérèglement, la réaction utile obéit à un protocole type.

« Quelle que soit son origine, une crise se caractérise par l’interruption d’une situation normale et par le fait qu’elle ne se prévoit pas, décrypte Ziad Touat, chef de projet au sein du cabinet Crisotech. Elle casse la routine et bloque les acteurs dans l’exercice de leurs fonctions habituelles. C’est pourquoi, elle génère initialement un phénomène de sidération. Inconsciemment, notre psyché va s’opposer à la crise dans la mesure où elle ne l’accepte pas. On ne veut pas croire qu’elle ait pu arriver d’autant que ce n’est évidemment jamais le bon moment pour cela et que l’on n’a, en général, pas le temps d’y être confronté. Il s’agit d’une problématique impromptue. »

Mettre en place une réponse adaptée

Dans tous les cas, une crise nécessite la mise en place d’une réponse adaptée. Ce sont précisément cette adaptabilité et la compréhension de la situation au regard de l’engrenage complet constitué par toutes les parties prenantes qui permettent de la gérer de manière optimale. Ce qui, en creux, signifie que toute crise permet d’apprendre à en appréhender d’autres. « Pour être gérée, une crise requiert donc d’être acceptée en tant que telle afin, précisément, de limiter le plus possible ce temps de sidération », explique Ziad Touat. Par ailleurs, l’entraînement est le seul moyen de savoir comment mobiliser son équipe pour faire face de manière efficace à ce genre de configuration par essence exceptionnelle.

Appliquer une check list

Pour limiter l’effet de la sidération, le recours à une check-list est recommandé. Elle comprend des préconisations simples pour, en quelque sorte, se réinitialiser sur le plan cérébral et retrouver la plénitude de ses capacités cognitives. Et ce, en préparant les bons outils et en mobilisant les bonnes personnes.

Constituer une cellule de crise

Il convient, tout d’abord, de constituer une cellule de crise qui regroupe les personnes compétentes pour gérer la crise. Il n’y a pas de panel imposé en ce qui concerne sa composition. En revanche, dans l’idéal, celle-ci doit être déjà connue et avoir été arrêtée dans le cadre d’exercices de simulation effectués en amont. En cas de survenue de crise, il suffit alors de convoquer les personnes concernées et préalablement désignées ainsi que leurs suppléants éventuels. Chacun se voit affecter une mission précise : alimenter et actualiser la main courante, gérer la logistique, etc. 

La configuration de la cellule est fonction de l’ampleur du dysfonctionnement à corriger et des compétences requises selon l’évolution de ce dernier. Elle est susceptible d’évoluer. Il est, par exemple, possible d’y convoquer des expertises successives selon les besoins. La clef demeure l’anticipation de ce qu’il est susceptible de se passer et des effets des décisions prises.

Cette cellule a notamment vocation à transformer les informations reçues de toutes parts en informations utiles pour mieux comprendre ce qu’il se passe, clarifier les perceptions et faire les choix les plus appropriés. Le but est de ne pas être saturé par des suppositions mais de s’en tenir à des faits avérés qui fondent la réponse. Il est en effet essentiel que le décideur ne soit pas lui-même pollué par l’information, qui en temps de crise, peut facilement se transformer en infobésité. Ce qui commande à la fois de prendre un minimum de recul et de bien sourcer l’information.

Tenir une main courante

Autre recommandation : suivre le déroulement de la crise en consignant en détails, sous forme de main courante, les divers événements qui la rythment. Lesquels ne sont pas neutres dans la mesure où ils sont susceptibles d’avoir un impact en termes de responsabilité judiciaire, tant civile et pénale, a fortiori en milieu hospitalier et en cas d’effets délétères sur les patients. Il est donc important de conserver une trace des décisions qui ont été prises au regard des faits qui se sont produits. Selon le temps que dure la crise, cette retranscription peut être effectuée sur papier ou de manière informatisée, notamment quand plusieurs personnes se relaient pour solutionner le dysfonctionnement.

Le retour à la normale

La finalité de la démarche est le retour à la normale après avoir pris les décisions qui s’imposaient avec les ressources idoines. « Le piège est d’attendre que la situation se décante suffisamment pour agir », avertit Ziad Touat. C’est pour cela que les personnes qui composent la cellule de crise doivent avoir un niveau de responsabilité suffisamment élevé afin d’être légitimes pour prendre, en temps et en heure, les mesures qui s’imposent, quitte, ensuite, à les faire évoluer. Selon les circonstances et le périmètre d’action du décideur, elles peuvent être actées de manière collégiale ou pas. « Le but est de savoir changer d’avis et de continuer à apprendre, l’écueil à éviter étant de rester borné à une décision », insiste Ziad Touat.

Par exemple, en cas de contamination d'isolateurs dans une unité de préparation des cytotoxiques, il importe, tout d’abord, de savoir si des poches ont été potentiellement contaminées et si, de ce fait, des patients en ont subi des conséquences cliniques. Il faut, en parallèle, être en capacité d’évaluer, au sein de l’unité de cancérologie concernée, le nombre de poches que l’on peut préparer pour savoir si l’on peut continuer à soigner tous les patients. Et, si tel n’est pas le cas, il ne faut pas hésiter à sous-traiter, c’est-à-dire affecter ses techniciens dans un autre hôpital pour y produire des poches ou décaler certaines prises en charge ou encore, établir une liste de patients prioritaires en fonction de leur pathologie. Cela implique de solliciter l’ensemble des parties prenantes : les médecins cancérologues, le fabricant du dispositif médical défaillant, les équipes en interne, la structure hospitalière etc.

L’après-crise

La cellule de crise doit toujours débriefer son action pour la caractériser et apprendre de cette situation exceptionnelle. Malgré la fatigue et l’envie d’un retour rapide à la normalité, un tour de table, à chaud, est nécessaire pour donner la parole aux acteurs de cette gestion de crise. Dans certaines situations, il convient également d’assurer un suivi psychologique des personnes qui ont géré la crise car, le plus souvent, « elles ont envie d’occulter ce qu’il s’est passé et de passer à autre chose, justifie Ziad Touat. Or, si une nouvelle crise survenait, toute l’émotion enfouie ressurgirait et les rendrait moins opérantes pour y faire face de manière efficace. »

Un debriefing à froid est tout autant recommandé, celui-là avec le concours d’une personne extérieure qui apporte un regard plus impartial. Lequel est destiné à optimiser les process mais également à identifier les outils et les ressources qui ont fait défaut ainsi que les organisations qui se sont révélées lacunaires.

Code vidéo : M-FR-00005152-1.0 Etabli en Septembre 2021

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Établi en août 2022