Pratiques innovantes
25/05/2023

Pharmacie hospitalière : les problématiques de recrutement

La question de l’attractivité de l’hôpital est au cœur des enjeux du système de santé. Lors des journées de formation Partage d’expertise production de chimiothérapie (PEPC) organisées les 21 et 22 mars 2023, une table ronde a été consacrée à cette thématique afin d’aborder la problématique du recrutement des préparateurs en pharmacie et des pharmaciens.

À la suite de la crise sanitaire, les établissements hospitaliers ont dû en affronter une autre : celle des ressources humaines. Et la pharmacie hospitalière est loin d’être épargnée. En témoigne le manque de préparateurs en pharmacie et de pharmaciens. « Ce constat de pénurie générale ne touche pas uniquement l’hôpital mais aussi les pharmacies d’officine », a fait savoir le Dr Marie-Laure Brandely-Piat, pharmacien des hôpitaux, Groupe hospitalier Paris Centre, Site Cochin, lors de la journée PEPC.

En France, 15 000 préparateurs en pharmacie manquent à l’appel ; 16 sur 52 au sein du GH Paris Centre. Conséquences sur l’organisation des PUI ? Des choix sur les activités prioritaires doivent être effectués. « Nous avons donc décidé de l’arrêt de la préparation de certains médicaments, notamment en néonatalogie, pour lesquels nous nous approvisionnons à l’hôpital Robert Debré afin de soulager nos préparateurs », a précisé le Dr Brandely-Piat, avant de poursuivre : « Nous avons également diminué les prestations sur les armoires informatisées que les préparateurs réapprovisionnaient jusqu’alors. »

L’origine des maux

Les freins au recrutement reposent notamment sur le manque de visibilité de la profession auxquelles s’ajoutent les lourdeurs administratives à l’embauche, la difficulté d’obtention des primes de risques ou encore les problématiques de logement et d’accessibilité propres à l’Île-de-France et aux autres grandes villes. D’autres problèmes, plus anecdotiques, ont également empêché la concrétisation de certains recrutements. Parmi eux : la vaccination obligatoire des professionnels soignants, la charte de la laïcité interdisant le port du voile, les activités à risque avec la pharmacotechnie ou encore les astreintes le samedi.

Ces difficultés doivent être corrélées à une volonté de changements exprimée chez les professionnels de santé dont les préparateurs en pharmacie : « Ils ne veulent plus effectuer toute leur carrière au sein du même établissement, certains voulant même parfois changer de métier », a souligné le Dr Brandely-Piat, rappelant l’importance accordée désormais à la vie personnelle, qui ne doit plus être impactée par le travail.

Ces constats sont lourds de sens à l’heure où le secteur public est directement concurrencé par les cliniques et les pharmacies d’officine, qui proposent parfois des salaires plus attractifs. Et ce d’autant plus que les PUI ne peuvent pas nécessairement répondre à toutes les attentes des collaborateurs qui revendiquent, dans leur exercice quotidien, de l’autonomie, de la créativité, des relations professionnelles enrichissantes et solidaires ou encore la reconnaissance du travail effectué. « L’hôpital affiche certes une utilité sociale élevée mais elle est moins visible pour la PUI », a-t-elle soutenu avant d’ajouter : « Un point positif toutefois, les relations professionnelles en raison de notre travail multidisciplinaire avec d’autres services. »

La pénurie de pharmaciens

La pénurie ne concerne pas uniquement les préparateurs en pharmacie mais aussi les pharmaciens. « À l’AP-HP, ainsi qu’en clinique, nous affichons un grand nombre de postes vacants d’assistants spécialistes », a rappelé le Dr Brandely-Piat. De même que les 1 100 places vacantes en deuxième année de pharmacie, conséquence directe de la réforme des études (PASS-LAS), vont nécessairement impacter, d’ici quelques années, l’organisation de la filière. Les pharmaciens ne sont plus attirés par l’exercice au sein de l’hôpital public en raison notamment des difficultés d’accès à des postes de praticiens hospitaliers. « Nous les sentons moins impliqués et moins volontaires, a constaté le Dr Brandely-Piat. Ils s’orientent désormais vers des postes en clinique proposant des salaires plus intéressants. »

Le recours à l’intérim

Face à cette situation globale, la direction de l’AP-HP a décidé de recourir à l’intérim tout d’abord pour les préparateurs en pharmacie. « Nous avons ouvert la boîte de Pandore, a regretté le Dr Brandely-Piat. À titre d’exemple, à l’hôpital Cochin, nous disposons de cinq intérimaires sur l’unité médicaments, quatre en production et trois en rétrocession à l’Hôtel-Dieu, structure avec laquelle nous partageons la PUI. » Soit 12 intérimaires, payés le double du salaire d’un préparateur salarié de l’équipe. « Le recours à l’intérim pose une vraie problématique avec le sentiment de disposer de deux équipes au sein de la même, a-t-elle ajouté. Certains préparateurs intérimaires s’engagent pour plusieurs mois, d’autres sur un temps plus court, nous nous interrogeons alors sur la nécessité de tous les former en sachant que parfois, nous n’avons pas d’autres choix pour le fonctionnement des activités de la PUI. » Sans oublier qu’ils peuvent poser leurs congés quand ils le souhaitent. En parallèle, l’AP-HP commence à recevoir des CV pour des pharmaciens intérimaires et envisage d’y avoir recours. En attendant, elle poursuit le déploiement de son plan « 30 leviers pour agir ensemble », visant à apporter des réponses « pragmatiques » et « efficaces » à l’ensemble des difficultés auxquelles font face les établissements de l’AP-HP.
 

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Établi en mai 2023