Un décret paru le 29 mars 2024 a fait évoluer le RIHN. Ce texte essaye de répondre à de fortes critiques exprimées contre ce dispositif créé en 2015 par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) dans le cadre du développement de l’innovation en santé. Dans son principe, le RIHN vise à attribuer un financement dérogatoire, précoce et transitoire, pour les actes innovants en biologie médicale et en anatomopathologie. Le financement repose jusqu’ici sur le principe d’une enveloppe fermée (380,10 millions d’euros pendant de nombreuses années puis 405,9 millions d’euros en 2021 et 493,29 millions d’euros en 2022) pour l’ensemble des actes y étant inscrits, et sur un financement partiel. « Avec ce modèle, ce n’est pas l’intégralité de l’acte qui est remboursé et le remboursement n’est versé que l’année suivante », pointe Arnaud Bayle, oncologue médicale à Gustave Roussy et économiste de la santé.
Ce modèle de financement a été dénoncé à maintes reprises, notamment par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), dans le cadre de son Evaluation du troisième Plan cancer (2014-2019) publiée en juillet 2020. Parmi les recommandations de la mission : modifier les modalités de régulation du RIHN en supprimant la règle du « prescripteur payeur », en définissant des référentiels de prescriptions et en assurant des contrôles de façon à sortir du système d’enveloppe fermée à montant constant tel qu’il existe depuis 2015.
Le principe du prescripteur payeur dénoncé
Premier point dénoncé donc, la règle du « prescripteur payeur ». L’IGAS pointe dans son rapport que l’accès aux actes innovants est « inégal sur le territoire ». En cause ? Le fait que l’établissement prescripteur doive payer à l’établissement effecteur les actes réalisés sur la base de la facture qu’il reçoit, pour les cas où le prescripteur n’est pas l’effecteur. Cette facture est établie sur la base du tarif de l’acte prévu dans le RIHN. Or, le financement de l’établissement prescripteur est lui réalisé sur la base d’une régulation prix-volume, l’enveloppe consacrée au RIHN et à la liste complémentaire étant fermée. Ainsi, les données concernant le RIHN et la liste complémentaire pour l’année 2018 révèlent que le montant des actes prescrits était de 795 millions d’euros et le montant effectivement financé de 380 millions d’euros soit 47,5 % de l’enveloppe. L’IGAS a ainsi soutenu que « le système d’enveloppe fermée n’est pas adapté au développement de l’innovation et les modalités de mise en œuvre pèsent sur l’accès à des examens indispensables au développement de la médecine de précision avec des inégalités territoriales ».
Un manque de données pour l’évaluation des actes
Autre problématique : la finalité même du RIHN n’a pas été respectée. L’objectif initial était de permettre une prise en charge transitoire avant d’envisager un passage soit au sein de la Nomenclature des actes de biologie médicale (NABM), soit au sein de la Classification commune des actes médicaux (CCAM). Pour y parvenir, une évaluation devait être réalisée sur la base de recueils prospectifs et comparatifs de données cliniques ou médico-économiques. « Cependant, ces données permettant l’évaluation des actes ont rarement été fournies, retardant l’évaluation et expliquant le maintien des actes dans le RIHN », souligne Arnaud Bayle avant d’ajouter : « Les tutelles ont aussi fait preuve de prudence car l’impact budgétaire du passage à la nomenclature n’est pas anodin. » Conséquence : un stock d’actes s’est constitué au sein du RIHN, composé d’actes initialement innovants, mais désormais utilisés en soins courants.
Une réforme attendue
Face à un RIHN qui a montré ses limites, les tutelles ont décidé de le réformer, réforme prévue par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) de 2023 et acté par un décret paru le 29 mars 2024.
La réforme comporte quatre grands objectifs :
- dynamiser et encadrer les procédures d’inscription et de la radiation du RIHN en impliquant la Haute Autorité de santé (HAS) dans le processus d’évaluation des actes ;
- accroître le recueil de données en vie réelle pour permettre une évaluation rapide des actes et leur sortie du RIHN ;
- accélérer la tarification et la procédure de remboursement par l’Assurance maladie dans le droit commun ;
- ouvrir le dépôt des actes à de nouveaux acteurs comme les fabricants ou les distributeurs de dispositifs médicaux.
Dans le cadre de cette réforme l’implication de la HAS a conduit à la création de la Commission d’évaluation des technologies de santé diagnostiques, pronostiques et prédictives (Cediag), afin d’évaluer les actes actuellement inscrits au sein du RIHN et ceux à venir dans le cadre de la nouvelle mouture.
Les critères pour être éligible et financé par le RIHN 2.0 ont également évolué. Le dossier de demande d’inscription doit :
- concerner un acte de biologie ou d’anatomopathologie innovant ou un test compagnon d’un médicament qui dispose d’une autorisation d’accès précoce ;
- présenter les modalités de réalisation d’un recueil de données cliniques ou médico-économiques ;
- être déposé par un Conseil national professionnel (CNP) ou par l’exploitant d’un dispositif médical de diagnostic in vitro (DMDIV).
Le contenu du dossier de demande d’inscription
Par ailleurs, un arrêté du 25 novembre 2024 précise le modèle du dossier de demande d'inscription et la liste des éléments justificatifs associés pour la demande de prise en charge des actes innovants de biologie ou d'anatomopathologie hors nomenclatures.
Le dossier doit comporter :
un argumentaire justifiant de manière synthétique la conformité de la demande aux critères d'éligibilité ;
l'ensemble des éléments au soutien de l’argumentaire d'éligibilité.
L’arrêté précise également l’ensemble des pièces justificatives à fournir. La plateforme dédiée est désormais accessible depuis décembre 2024.
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