Pharmacotechnie
13/02/2024

Bonnes pratiques de préparation (BPP) : leur application en pédiatrie

Les nouvelles Bonnes pratiques de préparation (BPP) élaborées par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) et destinées aux pharmaciens d’officine et hospitaliers, ne comportent pas de focus sur les préparations pédiatriques. Opposables depuis septembre 2023 en remplacement de celles de 2007, elles induisent cependant des changements et une plus grande vigilance dans le cadre du dossier de préparation. Explications avec le Dr Bertrand Pourroy, pharmacien hospitalier à l’Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM).

© GEOL Alex Bonnemaison

Une plus grande vigilance du pharmacien

Quelles sont les évolutions apportées par les nouvelles Bonnes pratiques de préparation en pédiatrie ?

Dr Bertrand Pourroy – Il n’y a pas de focus spécifique à la pédiatrie dans les BPP. En revanche, ces BPP présentent une nouveauté : elles mettent à disposition des pharmaciens un outil d’analyse de risques et un autre outil, à savoir le dossier de préparation. C’est notamment grâce à ce dernier que la dimension pédiatrique est traitée. Ainsi, les populations pédiatriques sont clairement désignées dans le dossier de préparation que le pharmacien doit constituer et renseigner. Cinq catégories sont déterminées : prématuré, nouveau-né (0-27 jours), nourrisson (28 jours-23 mois), enfant (2 à 11 ans) et adolescent (12-17 ans). La procédure d’élaboration du dossier comporte ensuite de nombreux éléments concernant les préparations pédiatriques qui vont sensibiliser le pharmacien à différents points de vigilance.

Pouvez-vous nous citer des exemples ?

Dr Bertrand Pourroy – Le pharmacien doit par exemple s’interroger sur les restrictions d’utilisation, la présentation de la préparation, les excipients, et les justifier. Ceci le conduira à s’interroger sur les préparations, la formalisation des dosages et de repérer d’éventuels problèmes. Par ailleurs, les préparations sont classifiées en trois catégories de risques : risque faible, risque moyen et risque fort. Pour les deux dernières catégories, la vigilance du pharmacien doit être accrue sur les substances vénéneuses utilisées pour les enfants de moins de 12 ans. Ce focus ne figurait pas dans les anciennes BPP. Tous ces points renforcent l’attention du pharmacien, c’est positif.

Des nouveaux questionnements sur la préparation

Le dossier de préparation permet-il également une traçabilité des préparations ?

Dr Bertrand Pourroy – Ce dossier permet en effet d’assurer une traçabilité. Dans certains cas, les traitements destinés aux enfants sont préparés de la même façon depuis des années et les pharmaciens ne se posent plus de questions sur les raisons ayant conduit à utiliser tel dosage ou telle présentation. L’apport des nouvelles BPP est d’inciter le pharmacien à se poser des questions : la préparation pédiatrique est-elle adaptée ? Une spécialité d’un laboratoire pharmaceutique n’est-elle pas déjà disponible ? Et sinon, quelle préparation est pertinente ? Cela pousse aussi à effectuer une recherche de données bibliographiques. Le dossier de préparation oblige surtout une formalisation de la réflexion sur les préparations pédiatriques.

Cette formalisation va également prendre du temps. Pensez-vous que les pharmaciens sont prêts à ce travail supplémentaire ?

Dr Bertrand Pourroy – Les BPP sont applicables depuis le 20 septembre 2023, les pharmaciens doivent se les approprier. Cela va prendre du temps. Je pense d’ailleurs qu’il est préférable de mettre en place le dossier de préparation prioritairement de façon prospective et non rétroactive sur les préparations préparées auparavant. Cela représente un travail supplémentaire mais au bénéfice de la qualité et de la traçabilité, et bien sûr des patients.

Le dossier de préparation dans les BPP

La constitution du dossier de préparation est développée dans le chapitre 4 des Bonnes pratiques de préparation, « Documentation ». Il est également détaillé dans les trois parties de l’annexe II, présentant un exemple de dossier de préparation :

  • la validité technico-réglementaire de la préparation pharmaceutique ;
  • la préparation pharmaceutique et son procédé ;
  • la spécification, les contrôles et l’assurance de la qualité de la préparation pharmaceutique.

« Dans la mesure où il n’existe pas d’autorisation de mise sur le marché pour les préparations pharmaceutiques, l’élaboration d’un dossier regroupant (ou pouvant y faire référence) la documentation (par exemple RCP des spécialités) et le questionnement nécessaire à l’élaboration des fiches de préparation, de conditionnement et de contrôle est à constituer. L’analyse technico-réglementaire de la préparation, sa faisabilité, les spécificités de sa réalisation et de son contrôle sont décrites dans ce dossier », est-il expliqué.

Il est précisé que la pharmacie doit réaliser une évaluation du risque lié à la préparation et qu’une recherche bibliographique « appropriée » doit permettre de connaître les données toxicologiques et cliniques relatives aux substances actives et aux excipients de la préparation. Les éléments permettant la mise en évidence de la faisabilité technique de la préparation doivent aussi être documentés.

La partie du dossier « spécifications et instructions de la préparation pharmaceutique et de son conditionnement » regroupe les spécifications et instructions des produits intermédiaires, des préparations terminées et des articles de conditionnement. Elle met notamment en évidence les points critiques éventuels de l’élaboration de la préparation. Réalisée pour toutes les préparations, elle permet la rédaction des formules et instructions de préparation et de conditionnement. Le dossier de préparation doit aussi comporter la description des contrôles à réaliser en cours et en fin de préparation.

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Établi en février 2024